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Décryptages
24.1.23

Déploiement des technologies et tipping points

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Déploiement des technologies et tipping points

Décarboner l’ensemble des secteurs de l’économie d’ici 30-50 ans va nécessiter de déployer rapidement de nombreuses technologies pour qu’elles se substituent aux technologies existantes- généralement très émettrices de gaz à effet de serre. Le déploiement d’une technologie suit généralement une courbe en S : après une période de développement (qui peut prendre plusieurs décennies), une phase de déploiement rapide (exponentielle pendant un certain temps) dure jusqu’à l’approche de la saturation du marché.

Dans un rapport récent, intitulé The Breakthrough Effect : how to trigger a cascade of tipping points to accelerate the net zero transition, SYSTEMIQ (en collaboration avec l’université d’Exeter et le Bezos Earth Fund) analyse les points de bascule (tipping points) nécessaires pour activer un déploiement rapide des technologies bas-carbone. Ces points de bascule socio-économiques se produisent quand un ensemble de conditions est réuni et permet aux nouvelles technologies de détrôner les alternatives carbonées. A mesure que les nouvelles technologies se déploient, leurs performances augmentent et leurs coûts diminuent, permettant d’accélérer le déploiement. 

Le rapport identifie 3 conditions nécessaires à l’émergence des points de bascule:

  • le coût : généralement plus élevé à l’émergence d’une nouvelle technologie mais qui baisse au fur et à mesure du déploiement, et qui peut être compensé par des mesures incitatives 
  • l’attractivité : meilleures performances, accès à de nouvelles fonctionnalités, etc
  • l’accessibilité : en général il est nécessaire qu’une infrastructure adaptée soit disponible pour le déploiement en masse. On peut penser ici aux points de charge pour les véhicules électriques ou au réseau électrique pour les renouvelables.

Le rapport souligne également le fait que l’atteinte de tipping points pour une technologie donnée peut avoir des effets accélérateurs pour d’autres technologies. Par exemple, le déploiement des véhicules électriques permet de faire baisser le coût des batteries et motive le développement de chimies plus efficaces et/ou moins chères. Cela favorise le développement des camions à batteries qui bénéficient des progrès effectués, mais également le déploiement de solutions de stockage d’électricité couplées à du photovoltaïque par ex. Il faut également prendre en compte les possibles freins au déploiement, comme par exemple la disponibilité des grandes quantités de métaux nécessaires à la transition. 

Prédire la baisse des coûts d’une technologie est un exercice compliqué, et le taux d’apprentissage (le coût baisse d’un certain pourcentage à chaque doublement de la capacité installée) a des conséquences très importantes pour le déploiement d’une technologie et l’atteinte de la parité avec les alternatives carbonées. Un article publié en 2020 dans la revue Joule proposait une classification en 3 types selon la complexité du design et les possibilités de standardisation. Le photovoltaïque est un excellent exemple de technologie ayant atteint un fort degré de standardisation et une amélioration constante des procédés de fabrication. A l’opposé, les centrales à gaz, charbon ou nucléaire, connaissent des taux d’apprentissage relativement faibles. D’où les efforts faits dans le nucléaire sur les SMR afin de bénéficier de fortes économies d’échelle.

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